La taxation écologique du transport aérien en question
En juillet 2019, faisant suite au deuxième Conseil de Défense Écologique, Elisabeth Borne, alors Ministre des Transports, a annoncé la mise en place, à partir de 2020, d’une « écotaxe » sur le transport aérien dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique.
Cette taxe, dont le montant varierait en fonction de la destination (vols intra-européens ou extra-européens) et de la classe du billet, ne s’appliquerait qu’aux vols au départ de la France et ne concernerait que 30 % du trafic total français (soit environ 50 millions de passagers). Nombre d’exclusions sont envisagées. Ses recettes, évaluées par l’Etat à 182 millions d’euros par an, seraient affectées au budget de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), une agence dont le budget est consacré à 40 % au routier, 40 % au ferroviaire et 20 % aux autres transports, à l’exclusion de l’aérien. Le produit de la nouvelle taxe ne profiterait donc qu’aux autres modes de transport.
Suite à cette annonce, le SNPL a fait réaliser une étude d’impact de cette taxe par Carbone 4, un cabinet indépendant spécialisé dans la transition carbone et l’adaptation au changement climatique, basée sur deux hypothèses de comportement des compagnies aériennes.
Il en ressort que, dans le cas où la taxe serait répercutée sur le prix du billet, il y aurait un impact très limité sur la demande. En outre, les effets en termes de baisse d’émissions de CO2 seraient également très limités. Dans le cas où la taxe ne serait pas répercutée sur le prix du billet, l’impact environnemental serait nul. En revanche, les compagnies aériennes françaises subiraient un impact économique significatif, alors que l’impact sur les autres compagnies aériennes serait quasi-nul. Cette situation viendrait alors s’ajouter aux difficultés actuelles du pavillon aérien français.
Pour le SNPL, une réponse purement fiscale et franco-française s’avère inadaptée et passe à côté de son objectif de diminution des émissions de CO2. Une telle fiscalité n’a de sens que si elle est reprise au niveau européen ou international afin que son effet sur la transition écologique soit multiplié mais surtout que l’ensemble des compagnies aériennes soit mis à contribution, préservant ainsi une concurrence équitable.
C’est aussi sans compter sur le fait que le transport aérien est une industrie déjà très engagée dans la lutte contre le changement climatique. Dans un contexte de transition énergétique et écologique, les développements technologiques pour réduire ces émissions de CO2 sont primordiaux, d’autant que la hausse du trafic aérien est estimée à environ 4 % par an.
L’action de l’État dans ce domaine est déterminante. Si l’objectif est de rendre les appareils 80 à 100 % moins polluants d’ici 2050, les axes prioritaires du Gouvernement doivent porter sur l’accélération de la baisse de la consommation de kérosène (amélioration de l’efficacité du contrôle aérien, soutien à l’acquisition d’avions moins polluants…), et le développement de nouveaux carburants, tels les biocarburants notamment. Pour ce faire, la mise en place de mesures incitatives pour soutenir la recherche et le développement dans les motorisations, ou l’essor d’une filière française de carburants alternatifs décarbonés serait bien plus constructive qu’une taxation à outrance…